Renoncerais-tu à ton plus grand rêve par conviction ?

Si tu as du mal à répondre à cette question, rassure-toi, c’est normal. Prendre certaines décisions qui peuvent impacter le reste de nos vies est un acte qui demande un grand courage. La difficulté réside dans le fait de renoncer à quelque chose qui nous est cher pour assumer une idée qui l’est peut-être tout autant. L’idée du choix nous paralyse, comme il paralyse l’enfant à qui on demanderait de choisir entre sa mère et son père au moment d’un divorce. Certains choix semblent impossibles. Et pourtant…

N'est-il pas vital pour l’homme d’affronter ses peurs ? D’embrasser la prise de risque et d’assumer ses actes ? N’en ressortirait-il pas grandit ? Renoncer à la gloire, la célébrité, la richesse, les hommages, pour l’idée que l’on a de soi. Pour chérir sa dignité et ses valeurs. Voilà le message qu’a envoyé au monde Jorge Carrascosa, capitaine de l’équipe d’Argentine de football dans les années 70.

À l’époque, son pays est dirigé d’une main sanglante par le général Jorge Rafael Videla, chef de la junte militaire, qui destitua en 1976, Isabel Perón pour prendre le pouvoir et installer une dictature.

En 1977, le peuple argentin compte ses morts et ses disparus parmi les opposants civils au régime. Au moins 9 000 personnes sont victimes de « disparitions forcées » dans des centres de détentions et de tortures clandestins, tandis que 500 000 autres sont contraintes à l’exil.

C’est pourtant dans ce contexte, que le pays se prépare à accueillir la Coupe du monde de football 1978. Certes, le choix de la FIFA d’attribuer à l’Argentine l’organisation de sa plus prestigieuse compétition a été scellé bien avant le coup d’État, mais l’idée de célébrer les valeurs du football dans un pays tenu par une dictature a du mal à passer dans les opinions publiques des pays démocratiques.

Certains joueurs charismatiques de l’époque ont d’ores et déjà pris la décision de boycotter le Mundial argentin. Johann Cruyff a fait rapidement savoir qu’il ne viendrait pas, tout comme le « maoïste » défenseur allemand Paul Breitner. Leur décision est saluée par les uns, critiquée par d’autres, mais le vrai courage est personnifié par un autre footballeur : Jorge Carrascosa.

En 1977, un an avant le coup d’envoi du mondial, Jorge va renoncer à son rêve ultime de footballeur : Soulever la Coupe du monde en tant que capitaine de SA sélection, devant SON public et dans SON pays. Un moment unique que seuls quatre autres joueurs dans l’histoire ont eu la chance de connaître avant lui. José Nasazzi en 1930 pour l’Urugay, Gianpiero Combi en 1934 pour l’Italie, Bobby Moore en 1966 pour l’Angleterre et Franz Beckenbauer en 1974 pour l’Allemagne.

À partir de 1977, Jorge Carrascosa va refuser de jouer au football pour servir la vitrine d’une dictature sanguinaire. Il rend son brassard de capitaine de la sélection albiceleste et tourne le dos à tout ce qu’il juge contraire à sa mission d’homme. Par ce geste, il s’aligne définitivement avec ce qu’il est au plus profond de lui et avec ce qu’il croit être juste.

Un acte sacrificiel avec pour conséquence, une mort sportive et sociale immédiate, mais qui, plus tard, le fera entrer dans la légende et dans le cœur des Argentins.

Le dimanche 25 juin 1978 à 18h, devant les 71 483 spectateurs du stade Monumental de Buenos Aires, Daniel Passarella, le successeur de Carascosa au poste de capitaine reçoit la Coupe du monde des mains de Rafael Videla et la soulève pour l’éternité. À quelques kilomètres de là, dans sa maison de Parque Patricios, « El Lobo » (Le loup) tel qu’il était surnommé par les supporters argentins, regarde le spectacle à la télé. Que ressent-il à cet instant ? Peux-tu imaginer le fond de sa pensée ? Comment cette histoire resonne-t-elle en toi ?

Clique ici pour découvrir le visage de Jorge Carascosa dans cette œuvre.

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